« SEMAINE SAINTE »
Auteur de cet article: Le Père Pierre Delcher
SOMMES-NOUS CONCERNES ?
Au terme du Carême, la semaine qui relie le dimanche des Rameaux à Pâques est appelée la « Semaine Sainte » : Semaine sainte parce qu’on y célèbre l’anniversaire des événements fondateurs du christianisme : les derniers jours de la vie du Christ, sa Passion, sa mort et sa Résurrection. Semaine Sainte parce que ces événements sont la source de notre salut, de notre communion à l’amour de Dieu et donc de notre sainteté.
C’est le sommet de l’année chrétienne. Pour les chrétiens, c’est la semaine la plus importante.
Mais comment allons-nous la vivre ? Dans notre monde sécularisé, où la fête de Pâques n’est plus au centre des vacances dites jadis « Vacances de « Pâques », dans notre monde planifié où l’on renvoie à l asphèreprivée tout ce qui touche à la religion, dans notre monde technique où il devient difficile d’assurer une authentique et sérieuse transmission des valeurs spirituelles, qu’allons-nous faire de cette semaine sainte ?
Certes, le monde a changé ; une civilisation nouvelle se met en place…Il suffit de regarder toutes les réalités humaines, sociales, économiques…pour constater que nous ne sommes plus en l’an 1900 ! Et il est normal, en conséquence, qu’il y ait des changements aussi dans l’Eglise ; son visage n’est plus le même ; mais la réalité profonde reste, en particulier, la foi en Jésus-Christ, mort et Ressuscité qui révèle le sens ultime de nos existences et donne le vrai fondement des droits de l’homme. La foi chrétienne est au service de l’épanouissement de l’homme. « La gloire de Dieu, c’est l’homme vivant » écrivait déjà, au 1ersiècle, Saint Irénée.
Alors, pouvons-nous passer sous silence l’anniversaire des événements fondateurs de notre salut ?
Pouvons-nous vivre cette semaine sainte, comme les autres, sans des gestes de reconnaissance et de témoignage ?
Mais c’est notre responsabilité qui est engagée. L’humanité a besoin du salut du Christ ; l’humanité a besoin de l’idéal libérateur de l’Evangile ; l’humanité a besoin d’entendre une voix qui lui révèle le secret de son existence.
Célébrer la semaine sainte, c’est se souvenir, faire mémoire de l’intervention de Dieu en la personne de Jésus-Christ pour nous révéler son amour qui est allé jusqu’au partage de la souffrance et de la mort des hommes.
Célébrer la semaine sainte, c’est témoigner à la face du monde, de la dimension religieuse, spirituelle de nos vies humaines.
Parcourons les étapes de cette semaine :
- Jour des Rameaux : le paradoxe du comportement des hommes est mis en lumière : d’un côté, c’est l’accueil triomphal de Jésus perçu comme le Messie Sauveur, et de l’autre, avec le Récit de la Passion, le rejet de ce même Messie. A la fois, nous sommes des artisans et des défenseurs de la dignité humaine et des droits de l’homme, et de l’autre, nous participons ou sommes témoins passifs du mépris et de la déchéance de bien de nos frères. N’avons-nous pas à demander lucidité et courage ?
- Jeudi Saint : Jésus anticipe sous le signe du pain et du vin, le don de sa vie qui sera pleinement réalisé le lendemain sur la croix du Calvaire, et nous invite à renouveler ce geste, pour puiser la force de son amour. C’est l’institution de la messe. « Faites ceci en mémoire de moi ». N’avons-nous pas besoin de retrouver le sens de ce geste, et de réagir contre un laisser-aller : la vitalité de notre foi et de nos communautés est liée à ce sacrement de l’amour.
- Vendredi Saint : La mort d’un innocent, avec le supplice le plus infamant qui soit. Le silence de Dieu au calvaire est révélation de la vérité de son amour qui respecte l’homme Jésus jusqu’au bout de son don total, et en lui, respecte la liberté et la responsabilité de tout homme. « Père, pardonne leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font ».
Affrontés au mystère de la mort et de la violence, n’avons-nous pas à prendre le temps de contempler la croix du Christ, pour en accueillir tout le message de pardon et de vie dont l’humanité a besoin ?
- Pâques : Le point de départ de la prédication chrétienne : proclamer comme sauveur de l’humanité un condamné à mort : comment les disciples auraient-ils pu accomplir une telle mission, sans une expérience unique, authentique du Christ vivant par delà sa mort physique. Christ est ressuscité, Christ est vainqueur : avec lui, un monde meilleur, un monde où l’homme peut se réaliser de christianisme et les valeurs qui en découlent ?
Célébrer la semaine sainte, ce n’est pas accomplir des rites qui seraient coupés de la vie et de nos responsabilités humaines, mais c’est ressaisir nos vies, nos problèmes, nos questions, nos difficultés, nos épreuves comme nos joies, à la lumière de ce qui s’est passé il y a 2000 ans, mais en sachant que ce Christ est là au milieu de nous, toujours vivant, faisant appel à notre liberté, et nous demandant de participer nous aussi à son mystère de mort et de résurrection, engagement à vivre le don de nous-mêmes pour un meilleur service de nos frères, y compris celui de les « brancher » sur le Christ, « le Chemin , la Vérité et la Vie ».
Prenons le temps d’examiner comment nous allons vivre la Semaine Sainte ? N’ayons pas peur de poser des actes qui témoignent qu’elle n’est pas pour nous une semaine comme les autres ? La vraie joie de Pâques est liée à ce réveil de notre foi et à la vérité de notre pratique.